Lot 84
FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe signée à Mademoiselle LEROYER DE CHANTEPIE. Croisset près Rouen

FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe signée à Mademoiselle LEROYER DE CHANTEPIE....
FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe signée à Mademoiselle LEROYER DE CHANTEPIE....
FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe signée à Mademoiselle LEROYER DE CHANTEPIE....

FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe signée à Mademoiselle LEROYER DE CHANTEPIE. Croisset près Rouen, 19 juin 1876. 2 pages et demie, in-8, sur papier bleu (qq. rousseurs et déchirures) Ma chère correspondante, Non ! je ne vous avais pas oublié, parce que je n'oublie pas ceux que j'aime. Mais je m'étonnais de votre long silence, ne sachant à quelque cause l'attribuer. Vous désirez savoir la vérité sur les derniers moments de madame Sand? La voilà : Elle n'a reçu aucun prêtre. Mais dès qu'elle a été morte, sa fille Mme Clésinger, a fait demander à l'évêque de Bourges l'autorisation de lui faire un enterrement catholique. Et personne dans la maison (sauf peut-être sa belle-fille Mme Maurice) n'a défendu les idées de notre pauvre amie. Maurice était tellement anéanti qu'il ne lui restait aucune énergie, et puis il y a eu les influences étrangères, des considérations misérables inspirées par des bourgeois.Je n'en sais pas plus long La cérémonie, du reste, a été des plus touchantes. Tout le monde pleurait et moi plus que les autres. Cette perte-là s'ajoute à l'amas de tous celles que j'ai faites depuis 1869. C'est mon pauvre Bouilhet qui a commencé la série, après lui sont partis Sainte-Beuve, Jules de Goncourt, Théoph. Gautier, Feydeau, un intime moins illustre, mais non moins cher, qui s'appelait Jules Duplan et je ne parle pas de ma mère que j'aimais tendrement ! Ce matin même, j'ai appris la mort de mon plus vieux camarade d'enfance. Enfin comme si le sort s'acharnait contre moi, à l'automne dernier, j'ai été complètement (ou à peu près) ruiné par un neveu, le mari de ma nièce que j'ai élevé. Presque toute ma fortune était placée dans sa maison de commerce et j'ai abandonné le reste pour empêcher sa faillite. Cette catastrophe m'a empêché de travailler pendant six mois. Maintenant j'en suis remis et j'espère deux choses : ne pas mourir de faim et de n'être pas forcé d'abandonner mon vieux Croisset. J'avais commencé un gd roman mais je l'ai quitté pour le moment et j'écris des choses courtes ce qui est plus facile. L'hiver prochain, j'aurai trois nouvelles prêtes à publier. Je vis maintenant entièrement seul (pendant l'été du moins) et, quand je ne travaille pas je n'ai pour compagnie que mes souvenirs qui succèdent à mes rêves, et ainsi de suite. La pauvre Mme Sand m'avait souvent parlé de vous, ou plutôt nous avions souvent causé de vous ensemble : vous l'intéressiez beaucoup. Il fallait la connaître comme je l'ai connue pour savoir tout ce qu'il avait de féminin chez ce gd homme, l'immensité de tendresse qui se trouvait dans ce génie. Elle restera une des illustrations de la France et une gloire unique. Réf. Correspondance (édit. J. Bruneau), Bibl. de la Pléiade.Tome 5 p. 51-52 ou la lettre n'est pas reproduite en entier.

Estimation : 800 € à 1 000 €
Adjugé : 6 500 €

SVV Bérard-Péron

Commissaires-priseurs
Antoine Bérard
François Péron
Rémy Rousselot
Grégoire Battin